Le livre « Jouer », un plaidoyer pour transformer notre monde

Paru aux éditions Actes Sud, le deuxième ouvrage d’André Stern – « Jouer. Faisons confiance à nos enfants » – s’est classé dans le top 3 de la bibliothèque BEJOUE. Il nous rappelle de la manière la plus douce que « jouer » n’est pas un loisir, un divertissement, un temps à part. Jouer est une nécessité.

 

Un livre manifeste à plusieurs voix

André Stern parle de jeu mais pas seulement. Ce livre fait intervenir différents champs : celui de l’enfance, de sa propre enfance, de l’éducation, de l’école, de la société, du monde du travail,… L’auteur étoffe son propos en faisant appel à une multitudes de voix. L’alternance entre récits personnels, expériences intimes, données scientifiques et recherches, fait de l’ouvrage « Jouer« , un merveilleux manifeste sur la force du jeu.

Ne nous trompons pas. Cet ouvrage n’est pas un manuel d’éducation. C’est un enchevêtrement de pensées. Au fil de la lecture, les contradictions de notre société se déroulent, s’expliquent. Et grâce à cette incessante mise en perspective avec l’adulte que nous sommes, avec l’adulte que nos enfants deviendront, on entrevoit des solutions. Et l’une d’elle, s’appelle « Jouer« . On le savait déjà mais on avait besoin de ce livre pour comprendre cette nécessité.

Une page du livre André Stern

Jouer pour devenir

Considérer le jeu comme une activité prioritaire, ne revient pas confiner les adultes dans le monde de l’enfance mais plutôt à les amener à être des « adultes » différents. Le problème est que nous souhaitons arracher l’enfant au monde du jeu pour qu’il acquiert des qualités dites d’adultes comme la concentration, l’attention, la constance, la capacité à dépasser ses propres limites, la créativité. André Stern nous explique que ces qualités sont précisément celles que l’enfant développe lorsqu’il joue.

Nous rêvons de voir chez nos adultes la constance que montrent nos enfants lorsqu’un jeu les a pris aux tripes. Ils sont capables de jouer indéfiniment à la même chose, de répéter sans fin le même geste, d’entendre mille fois la même histoire. Sans se disperser, sans déroger au rituel, sans lassitude, sans usure, sans pause.

« Ils aiment les animaux, on leur donne des Pokémon »

Les enfants pratiquent ce que l’on appelle le divergent thinking, « le génie des enfants (qui) transforme n’importe quel pépin de pomme en bijou précieux (…), de considérer une boîte en carton comme une voiture ». L’adulte bien souvent, cherche à lui apporter un vrai bijou, une vraie voiture.

Et parce que l’on pense que l’enfant veut donc jouer avec une vraie voiture, on va lui apporter une réplique. On va lui faire croire que ces objets sont réalistes mais finalement, ils ne sont que des « objets-zombies issus du marketing ».

Ils aiment les animaux, on leur donne des Pokémon. Ils aiment donc les Pokémon. Et ils pensent en Pokémon. Ils aiment les voitures, on leur donne Cars. Ils aiment les poupées, on leur offre des Barbie.

On pense que les enfants veulent toujours plus de jouets mais ils veulent simplement « jouer ». Notre propre escalade vers le « volontarisme pédagogique » et la « mercantilisation de l’enfance » provoque l’effet contraire sur nos enfants. Au lieu de les éveiller, ils se censurent.

Cette censure est l’ennemi du développement de la créativité, celle que l’on recherche péniblement lorsque l’on est adulte. Google dégueule de liens comme « 3 techniques pour trouver la bonne idée« , « Les techniques pour trouver son idée« , « Les 5 clés pour trouver la bonne idée« . Lorsque vous étiez enfant, des idées, vous en aviez plein.

Alors, continuez à « Jouer » !

Ma phrase favorite : « Nous ne volons plus que dans nos rêves, alors que nos enfants volent à chaque fois qu’ils le désirent : ils sont l’avion, l’oiseau, le pilote, le passager, le ciel…sans limites, sans frontières, sans terme.« 

À propos de l'auteur

Dite le petit futé de BEJOUE, elle aime les histoires de jeux et de gens, les enquêtes de terrain au pied de son immeuble, et la moquette dans les pubs.