Jouer à s’enfermer. Un paradoxe ?

Quelques heures avant l’annonce du confinement, on n’avait jamais autant joué à s’enfermer. Réflexion sur les escape game et notre rapport à l’enfermement.

Jouer à être enfermé.e.s

Ces dernières années, le monde a joué à se confiner dans des salles d’escape game. Rien qu’en France, on en dénombrait 700 dans 429 villes différentes. Ça nous excitait d’être enfermé.e.s dans des petites pièces. On en re-demandait encore et encore. Il y en a même qui, comme Rich Bragg, Dan Egnor, Ana Ulin et Amanda Harris, s’amusaient à battre des records d’enfermement, en jouant jusqu’à 22 escape games en 24h. Record bien évidemment validé par le Guinness World Record, cette autorité mondialement reconnue qui en dit long sur notre humanité !

Aujourd’hui, nos envies d’enfermement d’avant nous laissent un goût particulier à l’heure où l’humanité a vécu au rythme d’un confinement mondialisé.  Nous avons passé 58 jours confiné.e.s en France comme plus de 4 milliards de personnes dans le monde et cela ne nous excite plus du tout d’être enfermé.e.s entre quatre murs (ou plus pour les plus chanceux). On rêve de grands espaces, de pousser les murs, d’ouvrir la porte !

Chacun voit midi à sa porte

La porte devenue le symbole d’un engouement mondial pour l’enfermement, véhicule-t-elle toujours le même enthousiasme ? Dans la critique cinématographique de Michel Cournot à propos du film « Au hasard Balthazar », on pouvait lire :  « Une porte n’est pas simplement une ouverture pratiquée dans un mur, ou un assemblage de pièces de bois qui peuvent pivoter sur ses gonds. Selon qu’elle est fermée, ouverte, fermée à clef, battante, une porte est, sans changer du tout de nature, présence ou absence, appel ou défense, perspective ou plan aveugle, innocence ou faute. »

La vision de cette porte d’escape game est tout à la fois, enfermement et évasion ! Le 15 août 2019,  dans Libération, le géographe Manouk Borzakian titrait son article ainsi : « S’enfermer dans le «game» pour mieux s’évader ». Aujourd’hui, nos maisons sont devenues ces lieux d’enfermement. Nous y sommes à la fois protégé.e.s mais ils nourrissent nos envies d’ailleurs, nos plans d’évasion élaborés au fil des allocutions présidentielles.

Quand les escape game se réinventent…

Alors, on verra bien si on a toujours envie de jouer à s’enfermer ces prochains mois. En attendant, les créateurs et créatrices d’escape game cherchent des solutions pour continuer à nous faire jouer malgré leur avenir inquiétant.

En effet, selon une étude publiée dans leparisien.fr, seulement 287 enseignes d’escape games sur 818 résisteront après plus de trois mois de confinement. Si des cagnottes se mettent en place, on peut également voir de nouvelles initiatives.

Top 3 des escape game à faire chez soi !

Même enfermé.e.s chez nous, on veut continuer à jouer, à se divertir. En effet, comme l’explique Manouk Borzakian, « dans un lieu confiné, une heure durant, on oublie les contingences d’une existence plus ou moins monotone. On s’abandonne au divertissement, au sens pascalien de l’agitation nous permettant d’oublier, temporairement, notre condition. »

Alors, on vous recommande l’escape game virtuel de Hunting Town. Accompagné par un game master, vous évoluez en équipe dans une ville de votre choix, alternant recherche sur un plan, fouille sur Google View, énigmes, décryptage. Vous pouvez y jouer jusqu’à 6 participant.e.s et choisir la difficulté entre un scénario à Lille, La Rochelle, Toulouse ou Bordeaux. Nous l’avons testé à 3 participant.e.s, ce qui nous semble être le plus optimal pour éviter la cacophonie et permettre de créer une bonne cohésion d’équipe.

Si toutefois, vous avez envie d’être plonger dans un véritable escape game avec un contenu très rythmé et original, on vous conseille la mission très abordable, La Traque de La Ligue des Gentlemen. Vous jouez à 2 équipes quand vous le souhaitez. En effet, il n’y a pas de créneau à réserver, ni de game master. Vous évoluez dans le scénario à votre rythme…enfin presque ! Le suspense est optimal et l’écoute est l’une des clefs de la réussite.

Si vous êtes allergiques aux visio-conférences, et que vous avez envie de jouer solo, vous pouvez expérimenter l’Escape Game en BD de Fabien Olicard. 

Aujourd'hui je vous propose de jouer ! Voici un Escape Game en BD de 3 cases fait maison 🙂 Vous pouvez bien sûr…

Publiée par Fabien Olicard sur Vendredi 27 mars 2020

 

Alors « jouer à s’enfermer » est peut-être un paradoxe pendant cette période. Mais disons que les écrivains et scénaristes avaient déjà expérimenter « le théâtre dans le théâtre » ou encore « le cinéma au cinéma », maintenant place aux créateurs d’escape game d’imaginer « l’escape game dans l’escape game » !

À propos de l'auteur

Dite le petit futé de BEJOUE, elle aime les histoires de jeux et de gens, les enquêtes de terrain au pied de son immeuble, et la moquette dans les pubs.