Quand la mixité au travail s’explique par le jeu

Le 12 septembre 2017, Marlène Schiappa, secrétaire d’État, affirmait que « L’égalité professionnelle est un enjeu de société, de communication, de performance, en plus d’être une obligation légale ». Mais comment atteindre la mixité au travail quand on sait que les hommes occupent encore bien plus que les femmes, l’ensemble des fonctions à hautes responsabilités en entreprise ? Plus efficace que le « Name and Shame », il y a SecretCAM, un jeu créé par le Cnam – Pays de la Loire.

Plusieurs études récentes , notamment celle du cabinet Hays, leader mondial du recrutement spécialisé,  montrent que la mixité augmente la performance des entreprises. Auparavant présentée comme un fait de justice sociale, la lutte contre les inégalités entre les femmes et les hommes au sein des entreprises, est amenée par l’angle économique. On lui confère à présent (et enfin) des résultats positifs tant au niveau de la croissance de l’entreprise, de la productivité que du bonheur des salarié.e.s. Pour autant, les inégalités perdurent.

Changer les femmes, Changer les hommes, Avec des serious game

Pour faire évoluer les représentations sociales et les pratiques des dirigeants, Le Cnam – Pays de la Loire a développé depuis 2015 un Serious Game dédié aux thématiques de la mixité femmes-hommes. Cet outil ludique a pour ambition de faire changer de regard, de « conscientiser » comme l’expliquait François Calvez, directeur du pôle Tice lors d’un débat sur « Conduite du changement et serious game : pourquoi rester sérieux ? » organisé dans le cadre de la Nantes Digital Week.

SecretCAM Egalité est un jeu utilisé en présentiel dans les entreprises. Grâce à l’utilisation d’une caméra subjective, on plonge au sein d’un service marketing-commercial. Notre rôle est celui de Camille, qui vient d’arriver dans l’entreprise depuis 2 semaines. L’idée est de se mettre dans la peau de ce personnage de 35 ans, qui doit s’occuper du pilotage d’un nouveau produit High Tech. Plusieurs personnes gravitent autour de lui / de nous, car il s’agit bien d’un jeu immersif à la manière « d’un livre dont vous êtes le héros ».

« On a pas l’habitude de voir des femmes sur ce genre de postes techniques »

Pendant 40 minutes, le personnage de Camille relève des missions mettant en évidence des thématiques comme l’auto-censure, le réseautage, le congé parental, les quotas, le pouvoir, l’orientation, les stéréotypes, les salaires, les compétences. Au fil du jeu, nous essayons de mener à bien nos missions et de gérer les relations dans l’équipe : Karine, David, Julien et la nouvelle recrue, Dominique. Pour avancer dans le jeu, nous devons résoudre des situations parfois complexes. L’univers du jeu est réaliste et les différent.e.s collaborateurs/collaboratrices sont joué.e.s par des comédiens/comédiennes.

A la recherche des stéréotypes

Les différentes répliques semblent parfois grossies, caricaturales. Et pourtant, SecretCAM véhicule une réalité vécue, un discours authentique. En effet, François Calvez précise que :

Les situations proposées dans le jeu sont toutes tirées d’une réalité vécue et le scénario a été validé par un comité de pilotage composé d’entreprises et institutions partenaires.

Pour élaborer ce type de jeu, il y a un travail préparatoire conséquent de recherches (lectures scientifiques sur le sujet, émanant de sociologues, de psychologues du travail ou d’anthropologues) et d’entretiens. Pour ce jeu, les équipes pédagogiques du Cnam ont interrogé des salarié.e.s, des dirigeant.e.s d’entreprises de 12 organisations comme EDF, MMA ou le Rectorat de Nantes.

Un ordinateur et une webcam

Le jeu, vecteur d’une histoire commune

Utiliser un Serious Game, permet de tester des situations sans risque. Camille peut interagir avec ses collaborateurs grâce à des outils comme le téléphone, le mail, la webcam, et avec des discours différents : stratégie d’alliance, écoute ou approche frontale. Si le joueur n’est pas satisfait de son action, il peut utiliser des jokers, et recommencer. En fonction de ses choix, sa jauge de STRESS et sa côte de POPULARITÉ augmente ou diminue.

Mieux qu’une conférence sur le sujet de la mixité ou l’imposition de quotas, le jeu déconstruit la pensée pour la reconstruire. L’implication par l’immersion, l’utilisation du registre émotionnel, la motivation par la ludification, permettent de débloquer la parole et d’ouvrir le débat.

Aujourd’hui, il existe toujours dans les mentalités une sexualisation des compétences qui entravent à une bonne orientation dès le plus jeune âge. Mais à force de jouer, on n’entendra peut-être plus jamais des phrases comme « J’ai recruté une assistante homme ».

Découvrir SecretCAM ! 

 

À propos de l'auteur

Dite le petit futé de BEJOUE, elle aime les histoires de jeux et de gens, les enquêtes de terrain au pied de son immeuble, et la moquette dans les pubs.